St Michel et les mystiques modernes (1800-1950)

Les écrits de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerich (1774-1824) sont considérées par les commentateurs comme étant difficiles à évaluer en raison du problème du rôle éditorial exercé par son ami et secrétaire Clemens Brentano. Nous avons néanmoins un récit très intéressant de plusieurs visions de St Michel daté le 29 septembre (Fête des trois Archanges Gabriel, Michel et Raphaël) 1820 et concernant à la fois l'action de l'Archange dans le passé et au niveau eschatologique:

« J’ai eu plusieurs visions merveilleuses touchant les apparitions et les fêtes de l’archange saint Michel. J’ai été en plusieurs endroits du monde : j’ai vu en France son église sur un rocher au milieu de la mer et je l’ai vu comme patron de la France. J’ai vu comment il aida à remporter la victoire un pieux roi, du nom de Louis, qui, sur une révélation de la Mère de Dieu, s’était adressé à saint Michel et portait son image sur un étendard. Le roi fonda un ordre de chevalerie en l’honneur du saint archange. Je l’ai vu maintenant retirer le tabernacle de cette église qui lui est dédiée en ce lieu et l’emporter. Je vis aussi une apparition de lui à Constantinople et beaucoup d’autres que je ne me rappelle plus. Je vis aussi toute l’histoire miraculeuse de l’église de Saint-Michel sur le mont Gargano et je vis là une grande fête où se rendaient beaucoup de pèlerins étrangers avec leurs vêtements relevés et des pommes à leurs bâtons. Ici l’ange servait à l’autel avec d’autres. [...]

« J’allai ensuite avec lui à Rome où on a aussi construit une église en mémoire d’une de ses apparitions : je crois que c’est sous le pape Boniface et sur une révélation de la Mère de Dieu. Je suivais l’ange partout : il volait au-dessus de moi, grand et magnifique. Il tenait une épée à la main et portait une ceinture qui semblait composée de plusieurs rangs de cordons. 

[...]

« En montant je voyais toujours l’archange Michel planer au-dessus de moi, le ciel devenait de plus en plus clair et d’un plus beau bleu et je vis le soleil et d’autres corps célestes comme des visions. Il m’a conduit tout autour de la terre et à travers tous les mondes célestes. J’y vis des jardins innombrables suspendus en l’air : je vis les fruits et leurs significations. J’espère qu’il me sera encore donné d’y entrer et alors je demanderai quelques remèdes et quelques recettes pour guérir des gens pieux. Je vis des chœurs de saints et je vis souvent aussi çà et là tel ou tel saint figurer dans la sphère à laquelle il appartenait avec ses insignes distinctifs. Nous élevant toujours plus haut, nous arrivâmes dans un monde d’une merveilleuse et indescriptible beauté : c’était comme une coupole. Nous la vîmes semblable à un disque azuré entouré d’un anneau lumineux au-dessus duquel étaient encore d’autres anneaux semblables, chacun d’eux supportant un trône. Tous ces cercles étaient pleins d’anges de diverses catégories : des divers trônes partaient des lignes d’arcades de couleurs variées, ornées de fruits, de pierres précieuses et de précieux dons de Dieu, lesquelles allaient former une coupole surmontée à son tour de trois sièges ou trônes d’anges : celui du milieu était le siège de Michel : il y vola, portant le tabernacle de l’église qu’il plaça sur la coupole. Chacun des trois anges, Michel, Gabriel, Raphaël, avait au-dessous de lui trois des neuf chœurs d’anges.[...]Gabriel et Raphaël étaient en longs vêtements blancs, avec un extérieur plus sacerdotal, Michel avait sur la tête un casque avec un cimier de rayons. La partie supérieure de son corps semblait armée et entourée de cordons formant comme une ceinture : son vêtement allait jusqu’aux genoux comme un tablier à franges. D’une main il tenait un long bâton surmonté d’une croix sous laquelle était un petit drapeau avec un agneau ; l’autre main tenait une épée flamboyante, ses pieds aussi étaient lacés. »

« Au-dessus de cette coupole mon regard pénétra dans un monde encore plus élevé. J’y vis la Très-Sainte Trinité représentée par trois figures : le Père comme un vieillard semblable à un grand-prêtre qui présentait à son Fils placé à sa droite le globe du monde : celui-ci tenait la croix de l’autre main, à la gauche du Père était une forme lumineuse ailée. Autour d’eux était un cercle de vingt-quatre vieillards assis sur des sièges : les chérubins et les séraphins se tenaient avec beaucoup d’autres encore autour du trône de Dieu, chantant incessamment un cantique de louanges. »

« Au centre, au-dessus de Michel, se tenait Marie qui avait autour d’elle des cercles innombrables d’âmes lumineuses, d’anges et de vierges. C’est par Marie que la grâce partant de Jésus va aux trois archanges. Chacun des archanges envoie, comme des rayons, trois espèces de dons de Dieu sur trois des neuf chœurs d’anges inférieurs ; et ceux-ci à leur tour en font sentir l’action dans toute la nature et dans toute l’histoire du genre humain. »

« Lorsque le tabernacle eut été placé là, je le vis grandir de plus en plus, à l’aide d’influences venant d’en haut par Marie, auxquelles se joignait le concours de tous les cieux et le travail actif de tous les chœurs angéliques ; il devint d’abord une église, puis une grande cité resplendissante qui peu à peu s’abaissa vers la terre. Je ne puis dire comment cela se fit, mais je vis des multitudes d’hommes s’approcher de moi, montrant d’abord la tête comme si la terre sur laquelle ils étaient eût tourné ; puis ils se trouvèrent tout à coup sur leurs pieds dans la nouvelle Jérusalem, laquelle était cette cité nouvelle qui descendit au-dessus de l’ancienne Jérusalem et qui me parut venir sur la terre. »

« Lorsque j’eus vu descendre la nouvelle Jérusalem, cette vision prit fin : je m’enfonçai toujours plus avant dans les ténèbres et je me dirigeai vers ma demeure. J’eus encore la vision d’une immense bataille. Toute la plaine était couverte d’une épaisse fumée : il y avait des taillis remplis de soldats d’où l’on tirait continuellement. C’était un lieu bas : on voyait de grandes villes dans le lointain. Je vis saint Michel descendre avec une nombreuse troupe d’anges et séparer les combattants. Mais cela n’arrivera que quand tout semblera perdu. Un chef invoquera saint Michel et alors la victoire descendra. »

Elle ignorait l’époque de cette bataille. Elle dit une fois que cela arriverait en Italie, non loin de Rome où beaucoup d’anciennes choses seraient détruites et où beaucoup de saintes choses nouvelles (c’est-à-dire inconnues jusqu’alors) reparaîtraient un jour.

Parmi les transcriptions des très nombreuses extases de la stigmatisée bretonne Marie-Julie Jahenny (1850-1941), nous trouvons plusieurs passages attribués à St Michel Archange, notamment pendant les extases survenues le 29 septembre.[1] Bien que les supposées révélations de Marie-Julie restent controversées, il est frappant de constater que l'extase de 1880 annonce déjà la venue du Seigneur d'abord dans sa miséricorde, plus dans sa justice, déclaration qui anticipe une annonce très semblable dans le Journal de Ste Faustine dans les années 1920. On peut également des correspondances entre certains messages prononcés par la mystique de la Fraudais et le fameux récit d'une vision du Pape Léon XIII d'un dialogue entre Dieu et Satan, vision qui aurait incité le Pontife à composer sa prière invoquant l'assistance de l'Archange dans le combat spirituel.

Le 20 septembre 1877.

" La France refuse toujours de revenir à Dieu. Le Divin Jésus s'adresse à nouveau à Son Père :

" Mon Père, c'est pour Moi une grande douleur de frapper... mon peuple... Mon Père, Mon Père, jetez vos regards sur la terre, c'est la France, la France que j'aime tant ".

La Très Sainte Vierge :

"Mon Fils bien-aimé. la France, je l'ai adoptée pour ma Fille, Je l'ai toujours protégée, elle était le Lys de mon Coeur ... "

L'Archange Saint Michel :

"Seigneur, tous les damnés ont déserté l'enfer et semblent par­courir la France... pour jeter partout leur poison et leur venin... "

Notre-Seigneur répond :

"Saint Archange, c'est le temps de son règne, mais ce temps s'écoulera avec rapidité. Puis il rentrera dans les abîmes pour n'en plus sortir ; il sera enchaîné étroitement et ses chaînes ne se briseront jamais ".

29 septembre 1877 

« La Croix de Saint Michel s’illumine comme un flambeau. Toute la France se range autour du Trône du Divin Jésus. Saint Michel, debout, revêtu de toute sa gloire, tient son épée... Jésus lui donne l’ordre de séparer les bons d’avec les méchants. Le Saint Archange descend, le visage rayonnant et met une barrière entre les bons et les méchants... Je vois que la lutte va s’engager entre Saint Michel et l’Enfer, entre le bien et le mal... Marie Immaculée veille sur nous, que pouvons-nous craindre ?

Saint Michel dit :

« Je suis après Dieu, votre protecteur, votre soutien et votre ap­pui. Ayez recours à moi. Si vous connaissiez mon Pouvoir, vous seriez plus empressés à m’adresser chaque jour vos prières ».

29 septembre 1880

[...] Le Seigneur me charge de vous dire

à tous, cette parole : Tenez-vous prêts vaillants serviteurs de Dieu car le Divin Maître ne va pas tarder à venir premièrement dans sa Miséricorde, secondement dans sa juste colère et vengeance. Il veut que je dise cette parole à ses amis présents et j'ai fait mon devoir.

- Merci Saint Archange.

- Voilà cette épée que je délègue aux amis du Seigneur, voilà la mienne, elles se ressemblent, elles portent toutes les deux le cachet du Seigneur ; c'est le Nom de Jésus écrit sur la lame bien gravé. Chers amis du Seigneur, nous voilà donc sur le seuil de la Miséricorde et sur le seuil de la justice du Seigneur.

Voilà la porte que le Seigneur a réservé pour ses amis, voilà l'autre voie qui est celle des malheureux que le ciel menace de foudroyer de sa colère. [...]

 

Ce mois qui s'écoule, puisque nous voilà à la fin, le Seigneur avait dit cette parole à Satan : " Tu ne bougeras pas, tu ne te montreras pas plus que moi par ta puissance, Je te tiens encore enchaîné. "

Saint Michel dit que Satan répondait au Seigneur : " Mes chaînes seront libres à la fin de ce mois, vous me laisserez la liberté et je vais entrer comme un grand conquérant d'abord dans le Royaume menacé qui périra. "

Le Seigneur lui dit alors :

- Il périra beaucoup, il en périra beaucoup mais beaucoup seront sauvés et auront un abri sous la Croix et dans mon Coeur.

A ces mots, Satan, blasphéma devant le Seigneur et lui jurait une haine plus que jamais infernale. Saint Michel dit que Satan vomissait sa rage devant Notre-Seigneur en lui disant :

- J'attaquerai l'Église, je renverserai la Croix, je diviserai le peuple, je déposera dans le coeur un grand affaiblissement de la foi et il y aura un grand reniement. Il finit par dire au Seigneur :

- Je deviendrai pour quelque temps, le Maître suprême de toutes choses, j'aurai tout sous mon empire, même votre temple et les vôtres tout entiers.

Saint Michel dit que Satan aura aussi une permission pour quelque temps de tout et qu'il règnera pleinement sur toutes choses que fait le bien, la foi, la religion, tout descendra dans le tombeau d'un deuil profond. Satan et les siens triompheront joyeusement mais après ce triomphe le Seigneur prendra le sien à son tour.

Il triomphera du mal et fera sortir du tombeau, l'Église ensevelie, la croix anéantie, les prières en apparence disparues, tout le peuple consterné sous l'empire des massacres mais le Seigneur fera sortir le soleil qui console après qu'il aura été obscurci.

le 2 juillet 1895 

[...]Saint Michel dit :

- Mes bien-aimés fidèles, courage ! Encore un peu de temps, et vous verrez tout l'enfer se déchaîner pour tout renverser. Vous verrez des choses abominables, des violations épouvantables. La malice des hommes va encore grandir en fureur et en méchanceté. La fille aînée de l'Église sera divisée, partagée, déshonorée, souillée de crimes. C'est mon dernier mot.

Et la voix vibrante de l'extatique saisit les assistants.

Mes bien-aimés enfants, consolez-vous à l'heure du désespoir terrible, sous le coup de la Justice, la fille aînée de l'Église verra se lever pour elle ceux qui ont été ses sincères amis. Elle sera sauvée et chantera le Te Deum d'actions de grâces.[...]

Note:

1. Une autre mystique dont le journal spirituel contient des références à des expériences visionnaires de St Michel le 29 septembre est la Bienheureuse Elisabetta Canori Mora (1774-1825). Dans le Petit Journal de Ste Faustyna Kowalska (1905-1938), c'est également le 29 septembre (1931) qu'elle voit l'Archange:

"Je vis ce chef près de moi qui me dit ces paroles : "Le Seigneur m’a recommandé d’avoir particulièrement soin de toi. Sache que tu es haïe du Mal, mais n’aie pas peur. Qui est comme Dieu?" et il disparut. Cependant je sens sa présence et son aide." (Petit Journal, n° 706)

Nous trouvons également des récits de rencontres avec St Michel dans les écrits de la Bienheureuse Rosa Gattorno (1831-1900), fondatrice de la congrégation des Filles de Sainte Anne, Mère de Marie Immaculée.