Père Jean-Edouard Lamy (1853-1931) : "la paix sera rendue au monde"

Présentation :

Le Père Jean-Edouard Lamy (1853-1931), appelé un "second Curé d'Ars" par le Cardinal Amette, archevêque de Paris, fut ordonné prêtre en 1886. Curé de la Courneuve à partir de 1900, il a fréquenté diverses personnalités (Jacques Maritain - qui a préfacé sa biographie - et son épouse Raïssa, Erik Satie, Jean Cocteau, etc.) et fonda en 1930 la congrégation des Serviteurs de Jésus et de Marie. Il a vécu maintes expériences mystiques dès son enfance, comme des visions de la Vierge, de saint Joseph, d’anges et du diable. Dieu lui donna aussi le charisme de prophétie. 

Extraits :

Le Père Lamy était réputé pour sa prudence vis-à-vis des phénomènes charismatiques, disant :

"Il ne faut jamais bâtir son existence sur des visions, et surtout sur, celles des autres. Dans les choses matérielles, il ne faut connaître que le bon sens. Et dans les choses spirituelles, il faut encore du bon sens ; mais, là, nous ne saurions nous tromper, ayant les règles infaillibles, que Dieu nous a tracées. Il faut se défendre de la mystique. Le démon est derrière la Mère de Dieu : si on laisse passer Celle-ci, on trouve le démon."

En même temps, la biographie écrite par Paul Biver (chez qui il passa ses derniers jours terrestres) contient de longs passages où il raconte les apparitions qui lui avaient été accordées. Si le Père Lamy dit que "le démon est derrière la Mère de Dieu", le sens n'est pas uniquement figuratif : le 9 septembre 1909 à Gray, il assiste à un dialogue étonnant entre la Vierge et le Diable au sujet de la guerre à venir, dont il a des visions qu'il n'arrive à décrypter que partiellement :

"Après le Credo, Elle a parlé de la guerre sur un ton très douloureux : "Elle sera lente à s'allumer, elle embrasera toute l'Europe, elle embrasera l'univers. Il y aura environ cinq millions de tués, mais - se tournant vers Lucifer - j'en sauverai beaucoup malgré vous." Le démon Lui disait : "Ils passeront par la trouée des Vosges". La Sainte Vierge : "Non, ils passeront par la Belgique". Satan a dit : "Ils sont aussi coupables d'un côté que de l'autre". Satan connaît très bien les culpabilités. La Très Sainte Vierge s'est tournée à moitié vers moi, et le fond de l'église a été rempli par un nuage blanc, qui s'est ouvert. Le mur a disparu, et c'est là que j'ai vu une ville avec un immense fleuve. Je crois que c'est Belgrade."

Le 28 juillet, l'Autriche-Hongrie déclare la guerre contre la Serbie suite à l'assassinat de l'Archiduc Franz Ferdinand par Gavrilo Princip à Sarajevo. Le 29 juillet, l'artillerie autrichienne commence à pilonner Belgrade.

"J'ai vu les tableaux de la guerre. J'ai eu une sensation curieuse : je me sentais bien dans l'église, mais j'étais aussi transporté loin de l'église ; je ne peux pas me rendre compte exactement de la chose. Je me suis parfaitement rendu compte de la grâce que me faisait la Sainte Vierge, de me montrer ces pays. Elle m'a fait parcourir un pays immense. Je vous donne là des explications très incomplètes : je ne trouve pas de termes appropriés à ces choses. J'ai vu des navires de guerre avec des cheminées énormes. J'ai vu les paysages ; mais, plus tard, je me suis donné un mal énorme pour les situer et cela n'a pas été possible pour tout. On voit des fleuves, des monts, la mer : comment les situer sur des cartes ?"

Le Père Lamy parlait de la menace de la guerre non seulement à ses paroissiens, mais aussi au Vicaire Général Dupin. Quant aux questions eschatologiques, le fondateur des Serviteurs de Jésus et de Marie était par contre peu loquace, répondant un jour à un fidèle qui l’interrogeait à ce sujet : 

"Nous ignorons la fin du monde. […] Je ne sais qu’une chose : Notre-Seigneur a dit dans l’Évangile que ce jour n’était connu de personne, pas même des anges dans le ciel. Ses anges, eux-mêmes, l’ignorent. La Sainte Vierge, qui est dans le sein du Père, le sait ; mais Elle ne découvre pas son secret. Mille ans ? Deux mille ? Je n’en sais rien. Ce jour-là viendra comme l’éclair qui part de l’Orient jusqu’à l’Occident."

Il lui arrivait de préciser : "Elle [Marie] a bien voulu lever pour moi un petit coin du voile qui nous cache l’avenir, mais j’aime ne pas regarder les événements futurs. Confions-nous tout à fait en sa miséricordieuse protection."

Cependant, quelques bribes prophétiques citées par Paul Biver indiquent une certaine vision d'un temps de paix qui impliquera des changements assez radicaux dans le monde : un temps de grande évangélisation où "l'état d'âme des premiers chrétiens reviendra" et les vocations refleuriront, mais quand il y aura "si peu d'hommes sur terre". Des éléments qui vont dans le même sens que de nombreuses autres sources qui parlent d'une grande purification du monde et de l'Eglise avant ce renouvellement :

"Le saint archange Gabriel m’a dit, en parlant de Lucifer : ‘Il joue son va-tout ; il croit la partie gagnée’, en quoi il se trompe. […] Il faut prier avec espérance, malgré son tapage. […]. On sentira encore davantage quelle est la délicatesse de bonté de la Très Sainte Vierge, Mater Amabilis, Mater Admirabilis ! On la pressent dans la Très Sainte Vierge. Je lui dis souvent : ‘Bonne Mère, ne quittez pas le sein du Père, mais écoutez nos prières.’ […] La paix sera rendue au monde, mais je ne verrai pas cela, et il se passera d’autres choses, dont je ne verrai pas personnellement la fin. Quand la paix aura été rétablie dans le monde, que de choses seront changées ! La grosse industrie, c’est la guerre. La fabrication des avions, l’exploitation des mines, le travail du fer, tout cela diminuera. Il n’y aura plus de ces grandes usines où la moralité dégénère et disparaît. Les ouvriers seront bien obligés de se rejeter sur la terre. Le travail de la terre reprendra une grande extension. La terre redeviendra très chère. Quand la paix sera rendue au monde, l’industrie se ramènera à des proportions moindres et y restera. Tout s’amoindrira. Ils vont devant l’inévitable ; ils y arriveront tout de même. Ici, la terre a perdu beaucoup de sa valeur et il n’y a plus de bras pour la culture. Nous avions une jolie vigne : ma sœur a voulu absolument vendre sa part pour s’en débarrasser. Elle l’a vendue 100 francs ! Treize ares pour 100 francs ! […] Quand la paix sera rendue au monde, les terres acquerront plus de valeur qu’elles n’ont. Que les vieux ouvriers s’entêtent à mourir dans les villes, cela arrivera. […] Dieu voulait purifier la foi de son peuple en lui faisant faire un long séjour dans le désert. Les Israélites sont restés toute une génération dans les sables. J’ai souvent médité sur cette rude épreuve. De même, quand Dieu rendra la paix au monde, il faudra le réévangéliser, et cela sera l’œuvre de toute une génération. Il y aura un grand effort à donner pour la conversion des hommes après la paix rendue à la terre. Il y aura bien des difficultés. Saint Paul n’en a-t-il pas rencontré ? L’état d’âme des premiers chrétiens reviendra, d’ailleurs, mais il y aura alors si peu d’hommes sur terre ! Et il y aura à nouveau une floraison magnifique des ordres et des congrégations."

Si nous n'avons que très peu de déclarations prophétiques de la part du Père Lamy, c'est aussi parce qu'il jugeait inopportun de divulguer trop de détails :

"Je ne vous ai pas dit le dixième de ce que j'ai vu. Il y a bien des choses que je ne mettrai pas. Il y a des choses qu'il ne serait pas bon de dire, même dans quarante ans d'ici. Et puis, l'époque est peut-être la moins propice qui ait existé pour des révélations. Je ne parle pas d'une fraction du peuple, des catholiques fervents : ceux-là justement n'ont pas besoin de révélations."

Position de l’Église :

Le 2 octobre 1941, les Serviteurs de Jésus et de Marie arrivèrent à l’abbaye d’Ourscamp. Mgr Roder, évêque de Beauvais, a reconnu cette congrégation - dont la fondation avait été demandée par la Vierge - de droit diocésain.

Source : Paul Biver, Apôtre et mystique : le Père Lamy, préface Jacques Maritain (1951/1960). Texte consultable en ligne à https://livres-mystiques.com/partieTEXTES/lamy/table.htm

Voir également : https://www.serviteurs.org/-Notre-fondateur-.html