Anne-Catherine Emmerich (1774-1824) : "la démolition de l'Eglise et le retour de la foi"

Présentation

Née à Coësfeld en Prusse, religieuse au couvent des Augustines d'Agnetenberg, stigmatisée, Anne-Catherine Emmerich (1774-1824) est parmi les mystiques les plus célèbres dans l'histoire. Ses visions détaillées étaient notamment à l'origine du film La Passion du Christ de Mel Gibson (2004). Dans les dernières années de sa vie, elle a plusieurs visions concernant l'apostasie de l'Eglise, minée de l'intérieur par une "secte secrète", associée pour la plupart des commentateurs avec la franc-maçonnerie, notamment à cause des "tabliers" et "truelles" chez les "démolisseurs" oeuvrant à la construction d'une fausse église marquée par l'indifférentisme religieux. Comme d'autres mystiques de son temps (Bienheureuses Anna-Maria Taïgi et Elisabetta Canori Mora), cette grande crise est suivie par la renaissance du Corps du Christ. Ces visions présentent une grande parenté avec les écrits de mystiques plus récents tels que Don Stefano Gobbi, Pedro Regis, Luz de Maria de Bonilla, Edson Glauber, Vassula Rydén, Alicja Lenczewska ou le Père Michel Rodrigue.

Extraits :

Les propagateurs des Lumières

Elle vit, avec leurs terribles conséquences, les mesures que les propagateurs des Lumières prenaient partout où ils arrivaient au pouvoir et à l'influence, pour abolir le culte divin ainsi que toutes les pratiques et les exercices de piété, ou pour en faire quelque chose d'aussi vain que l'étaient les grands mots de lumière, de charité, d'esprit, sous lesquels ils cherchaient à cacher à eux-mêmes et aux autres le vide désolant de leurs entreprises où Dieu n'était pour rien. 

Le 12 avril 1820, elle raconta ce qui suit : "J'ai eu encore une vision sur la grande tribulation, soit chez nous, soit dans des pays éloignés. Il me semblait voir qu'on exigeait du clergé une concession qu'il ne pouvait pas faire. J'ai vu beaucoup de vieux prêtres et quelques vieux franciscains, qui toutefois ne portaient pas l'habit de leur ordre et notamment un ecclésiastique très-âgé, pleurer bien amèrement. J'en vis aussi quelques jeunes pleurer avec eux. J'en vis d'autres, parmi lesquels tous les tièdes, se prêter volontiers à ce qu'on demandait d'eux. Je vis les vieux, qui étaient restés fidèles, se soumettre à la défense avec une grande affliction et fermer leurs églises. Je vis beaucoup d'autres gens pieux, paysans et bourgeois, s'attacher à eux : c'était comme si l'on se divisait en deux partis, un bon et un mauvais. [...] les propagateurs des Lumières portaient une haine toute spéciale à la dévotion du rosaire [...]" (Karl Erhard Schmöger tr. E. de Cazalès, Vie d'Anne Catherine Emmerich, vol. 3, p. 161-162)

La secte secrète et les démolisseurs

"J'ai vu [...] les gens de la secte secrète saper sans relâche la grande Eglise, et j'ai vu près d'eux une horrible bête qui est montée de la mer. Elle avait une queue comme celle d'un poisson, des griffes comme celles d'un lion, et plusieurs têtes qui entouraient comme une couronne une tête plus grande. Sa gueule était large et rouge. Elle était tachetée comme un tigre et se montrait très-familière avec les démolisseurs. [...] Pendant ce temps, je vis çà et là, dans le monde entier, beaucoup de gens bons et pieux, surtout des ecclésiastiques, vexés, emprisonnés et opprimés, et j'eus le sentiment qu'ils deviendraient un jour des martyrs [...] je vis ces démolisseurs pénétrer dans l'église avec la bête: ils y trouvèrent une grande femme pleine de majesté. Il semblait qu'elle fut enceinte, car elle marchait lentement : les ennemis furent saisis d'effroi à sa vue et la bête ne put plus faire un pas en avant. Elle allongea le cou vers la femme de l'air le plus furieux, comme si elle eût voulu la dévorer. Mais la femme se retrouva et se prosterna la face contre terre. Je vis alors la bête s'enfuir de nouveau vers la mer et les ennemis courir dans le plus grand désordre." (ibid., p. 113)

"Je vis l'église de Saint-Pierre et une énorme quantité d'hommes qui travaillaient à la renverser, mais j'en vis aussi d'autres qui y faisaient des réparations. Des lignes de manoeuvres occupés de ce double travail s'étendaient à travers le monde entier et je fus étonnée de l'ensemble avec lequel tout se faisait. Les démolisseurs détachaient de gros morceaux ; c'étaient particulièrement des sectaires en grand nombre et avec eux des apostats. Ces gens, en faisant leur travail de destruction, semblaient suivre certaines prescriptions et une certaine règle : ils portaient des tabliers blancs bordés d'un ruban bleu et garnis de poches, avec des truelles fichées dans la ceinture. [...] Je vis avec horreur qu'il y avait aussi parmi eux des prêtres catholiques." (K.E. Schmöger, Vie d'Anne Catherine Emmerich, vol. 2, p. 202)

Anne-Catherine Emmerich fut béatifiée sous Jean-Paul II le 3 octobre 2004. Ses visions de la Passion restent pourtant sujet à caution à cause du rôle intermédiaire du poète allemand Clemens Brentano qui les transcrivit: il est difficile de savoir quelles sont les paroles de la mystique elle-même plutôt que de son rédacteur.